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Delphine Moreau a donné naissance à Lucien en octobre 2007. Waouh ! Quel scoop ! Attendez, attendez la suite... Figurez-vous qu'elle avait signé un articulet dans les pages littéraires du Figaro magazine du 12 janvier 2008 dans lequel elle disait avoir apprécié Balistique du désir et pour cause... la lecture de mon recueil ayant été associée à l'événement précité. Voici son récit...

27 octobre, minuit. Changement d'heure. On est censé en gagner une. C'est bon pour mon insomnie. Mon compagnon ronfle. J'allonge le bras vers la pile de service de presse qui m'attends sur la table de nuit. « Balistique du désir » de Max Obione. Je m'en empare avec la ferme intention d'en oublier le contenu aussi vite que j'aurai trouvé le sommeil : astuce de la jeune pigiste ignare, mais déjà blasée. Une heure. Touchants ces personnages. Ai un faible pour l'enfant tronc et la femme unijambiste. Deux heures. Subtiles ces effets de focale : le narrateur passe du « il » au « je » en quelques lignes, sans embrouiller pour autant celui qui lit. Trois heures. Jouissive pour finir, cette ode chorale et narquoise au désir, universel, de tuer. Moi je le partage à fond, et très régulièrement. Côté sommeil en revanche, aucune réaction à la prescription. Je me sens même un peu barbouillée. Mal au ventre. Envie de faire pipi. Encore envie de faire pipi. Fais pas ta chochotte. Pour finir, j'éclate en sanglots dans les WC : « Je vais quand même pas aller faire pipi toutes les cinq minutes ! », hoqueté-je. Retour aussi digne que possible dans le lit du conjoint. « Ma pauvre chérie, c'est encore ta migraine ? ». Non. Je lui dresse le tableau, rapide. « C'est pas normal, tranche-t-il virilement. Je t'emmène à l'hôpital ».

A l'accueil des urgences, l'aide soignante est moyennement motivée. « Par ici la salle d'attente ! Il y a deux dames avant vous ». Elles feuillettent de vieux magazines, à l'ombre des plantes vertes. Soit. Me sens un peu penaude. Fais quelques allers et retours dans le couloir. « Puisque vous vous agitez comme ça, on va vous examiner », elle s'énerve. L'interne m'expertise et cause à mes cuisses : « Vous êtes à sept : il reste une heure de travail, on vous monte en salle de naissance ! ». Elle plisse la bouche. « Tardez pas, qu'elle souffle à l'aide soignante, j'aimerais autant ne pas avoir d'accouchement ici .» Dans le monte-charge, je repasse le film de la soirée en accéléré. Y'a erreur dans le script. Ça, des contractions ? « Aussi douloureuses que quand on se pince les doigts dans une porte », avait pourtant prévenu la sage femme, celle des cours de préparation à la naissance. Et ce foutu gynéco, qui m'assurait il y a trois jours qu'une grossesse, c'était bien neuf mois, et pas huit ! Chui à sept d'accord mais sur combien, sept sur dix, sept sur sept, où est Anne Sinclair, et la péridurale dans tout ça ??? Plan d'ensemble sur une dame hurlante que de gentilles blouses blanches maintiennent à l'horizontale. C'est moi. Les mains de G. dans les miennes, désormais elles me servent d'unique contact avec l'extérieur, comme Helen Keller dans l'histoire.

Entracte. L'anesthésie me rend gentiment songeuse. «Tu sais ce livre de nouvelles que j'ai mis dans la valise avant de partir. Il faudra que tu y jettes un oeil. Je ne sais pas si c'est les hormones, mais je le trouve vraiment bien. »

Sept heures. Lucien est né. A travers le berceau de plastique, sur la table de nuit, j'aperçois le livre de Max. Il me reste encore trois nouvelles. Je les garde pour plus tard.


Accéder à la page de Balistique du désir

Tag(s) : #C'était l'autre jour...
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